
Le dimanche 4 février 2018, il s’est tenu en Guinée les premières élections locales depuis la fin du régime militaire en 2008. Non seulement ces élections locales étaient censées ramener une légitimité perdue depuis près de 15 années entre les populations locales et leurs administrateurs directs, mais de plus, elles étaient supposées refléter toute la maturité du système électoral guinéen après les cycles électoraux de 2010, 2013 et 2015. Il est déjà connu que, en plus d’être émaillés par des violences, ces précédents cycles électoraux qui avaient connu la participation d’observateurs internationaux indépendants ont tous été qualifié d’échecs tant ils ont manqué de transparence. À chaque cycle électoral, c’est un nouvel espoir démocratique qui se voit gâché par la fraude. De fraude électoral à fraude électoral, non seulement la confiance des populations envers les institutions s’est totalement érodée, mais de plus, la crise de confiance entre acteurs politiques s’est transformée en une crise politique permanente. Toutes les évaluations issues d’institutions internationales identifient aujourd’hui « l’instabilité politique » comme le facteur le plus élevé du risque pays de la Guinée.
C’est dans ce contexte que les élections locales du 4 février 2018 se sont tenues en Guinée. Comme il fallait s’y attendre, le taux de participation fut extrêmement faible car, étant lacées par la politique, les populations ont perdu de vue les véritables enjeux d’une élection qu’elles n’ont plus connu depuis près de 15 années. De plus, au grand désarroi du peu de citoyens ayant exercé leur droit de vote, ces élections du 4 février 2018 non pas non plus été transparentes. Elles ont même été pire que les précédentes :
- Utilisation extravagante et sans vergogne des ressources publiques par des ministres, des préfets, des maires, des chefs de quartiers et des fonctionnaires de l’État pour battre campagne;
- Utilisation abusive de procurations, au-delà de ce qui est permis, pour gonfler les suffrages en faveur de certains partis;
- Bourrage des urnes;
- Confiscation, destruction abusive et altération d’urnes et de bulletins de vote;
- Usage de la corruption à l’encontre des magistrats chargés de superviser le déroulement du processus;
- Intimidation et usage de la violence pour empêcher et exclure physiquement des acteurs du processus;
- Bataille rangée entre militants de différents camps politiques;
- Etc.
Depuis le 4 février 2018, voilà un aperçu des journées électorales et post-électorales en Guinée. Dans cette ambiance, il est facile de trouver aujourd’hui des acteurs qui sont très fiers de frauder ouvertement, d’usurper le suffrage du peuple, et de semer la violence entre les populations. Eux qui sont pourtant supposés être des modèles pour leurs enfants et toute la nation. Voilà! Encore et toujours les mêmes histoires depuis les premières élections multipartites en 1993 en Guinée. Comme si, pour ce pays, le temps s’était arrêté au 20ème siècle. Maudits soient ces fraudeurs!
« Maudits soient ces fraudeurs » n’est pas qu’un cri de colère, c’est aussi un cri de ralliement à l’ensemble des populations guinéennes, quelques soient votre appartenance politique : aucun d’entre nous ne peut être fiers de ce qui se déroule depuis le 4 février 2018. Si vous êtes fiers de ce qui se déroule depuis le 4 février 2018, alors je vous invite à interroger encore votre être profond.
Nous assistons à un nouveau hold-up électoral. Mais nous ne devons plus jamais nous résigner à cette situation. À partir d’aujourd’hui, je considère qu’il n’y a plus que deux camps en Guinée : « ceux qui sont pour la fraude électorale » et « ceux qui sont contre la fraude électorale ». La LDRG s’inscrit, comme toujours, dans le camp de « ceux qui sont contre la fraude électorale ». Nous invitons toutes les guinéennes et tous les guinéens qui sont contre la fraude électorale à la mobilisation totale pour faire respecter le suffrage du peuple. Il est temps de respecter la voix du peuple. Nous devons absolument doter notre pays d’un système électoral crédible, transparent et démocratique. C’est le seul moyen de garantir la stabilité politique et la paix en Guinée. Je dis bien le seul moyen!
Par la même occasion, nous saisissons les instances régionales et internationales et nous les invitons à préparer des sanctions ciblées à l’encontre de tous les acteurs de la fraude en Guinée. Autant nous croyons à la démocratie, autant nous croyons au système international. Le peuple de Guinée à choisi la démocratie. Le suffrage universel est un droit inaliénable du peuple de Guinée. Une violation du suffrage universel en Guinée est une violation des droits humains universels. Nous réclamons donc l’implication des instances internationales. Les missions d’observations électorales ne sont pas suffisantes : nous réclamons des sanctions ciblées contre les acteurs qui orchestrent la fraude et usurpent le suffrage des populations. C’est notre nouvelle ligne de défense, et nous sommes prêts à participer à toutes les initiatives destinées à doter la Guinée d’un système électorale crédible, transparent et démocratique.
Mamadou Oury Diallo
Président de la LDRG