
Guinéennes et guinéens,
Mes très chers compatriotes,
À chaque fois que les crises se multiplient, à chaque fois que les oppositions politiques se radicalisent, et à chaque fois les tensions ethniques augmentent, notre nation se rapproche de plus en plus de l’abîme. L’abîme c’est lorsque la haine de l’autre et l’amour de son propre pouvoir atteignent un tel point qu’ils recouvrent nos cœurs, bouchent nos oreilles et ferment nos yeux, nous rendant totalement insensibles à la souffrance d’autrui, sourds aux messages de vérité, et aveugles face à la réalité. C’est dans l’abîme que les pires atrocités se produisent. Dans l’abîme, la violence est omniprésente et des compatriotes s’entretuent parce que tout simplement ils sont de communautés ethniques différentes. Dans l’abîme, une catégorie d’individus est capable d’envisager des projets d’exclusion, de discrimination et d’extermination de toute une communauté ethnique. Dans l’abîme, le pouvoir politique est avant tout un pouvoir ethnique et népotique sans partage. Dans l’abîme, l’injustice et l’impunité sont la règle. L’intérêt général et le développement n’existent pas : il n’y a que des intérêts particuliers régis par la corruption et le clientélisme.
Mes chers compatriotes,
Voulons-nous vraiment nous laisser inéluctablement drainer vers l’abîme? Si nous choisissons d’aller vers l’abîme, alors la vérité est bonne à dire : nous sommes déjà bien parti. La haine est à son comble en Guinée car des leaders traditionnels et politiques encouragent désormais ouvertement la haine de l’autre. Il y a déjà eu beaucoup trop de tueries, beaucoup trop d’impunité, beaucoup trop d’injustice, trop de discrimination, trop de corruption, et trop de crises sans issues. Nous sommes désormais à la phase de militarisation de nos villes pour imposer par la force l’impunité, l’injustice et la discrimination. Nous ne parlerons plus jamais de développement social et économique en Guinée tant et aussi longtemps que nous sommes dans l’abîme. Il y a seulement un petit groupe d’acteurs au sommet de l’État qui va continuer à s’enrichir illicitement alors que l’écrasante majorité de la population subit une violence à huit-clos.
Pourtant, la violence appelle la violence car aucune communauté ethnique n’est destinée à être éternellement discriminée et réprimée. En survolant l’histoire de l’humanité, vous vous rendrez facilement compte que, à un moment donnée, toutes les communautés opprimées, discriminées et réprimées ont reçu l’appel d’assurer leur protection, leur survie et leur épanouissement. Parce que Alpha Condé et Kassory Fofana sont manifestement incapables de gagner les cœurs de nos populations et de développer notre pays, voilà à quoi ils veulent désormais inviter notre nation : à la violence et à la guerre civile. Ils nous invite à la violence parce qu’ils ont la conviction que sur le champ de la violence ils seront vainqueurs car ils ont des milices armées jusqu’aux dents capables de tirer sans discernement sur le peuple. Alpha Condé et Kassory Fofana préfèrent donc l’abîme que de voire l’autre au pouvoir. Ils préfèrent l’abîme pour se maintenir au pouvoir au détriment du progrès et du développement pour tous. Voilà leur projet.
Guinéennes et guinéens,
Voulons-nous vraiment nous laisser inéluctablement drainer vers l’abîme? Moi je suis un Peul très fiers du Fouta Djalon. La culture et les traditions Peuls sont d’une richesse inestimable. Je suis également un fils de Boké car je suis né à Kamsar, sur cette terre d’une bauxite pure. Et j’ai grandi à Conakry où j’ai côtoyé mes compatriotes de tous les horizons. Je parle couramment les langues poular et le soussou. Je comprends et parle un peu le malinké et le guerzé. J’adore les cultures et les traditions de l’ensemble des communautés ethniques qui composent notre nation. L’amour que j’ai pour notre pays et notre nation est ci-profond qu’il s’est développé chez moi un sens naturel du service civique. Quelque soient mes occupations, j’ai toujours été au service de mes compatriotes : en Guinée j’ai toujours servi dans les conseils d’administration des collèges et lycées où j’ai étudié; au Maroc où j’ai séjourné pour des études, j’ai également servi au sein de l’association de la communauté guinéenne; ici au Canada, je sert encore au sein de l’une des associations de la communauté guinéenne. Mais surtout, parce qu’il était insupportable pour moi de rester les bras croisés à voire la Guinée chavirer, j’ai créé un Mouvement qui s’appelle la LDRG. Dans le cadre de ce Mouvement, j’ai pris mon temps pour faire des recherches approfondies en vue de comprendre les problèmes et trouver les solutions nécessaires pour réformer qualitativement notre pays. Aujourd’hui, dans le cadre de ce Mouvement, nous avons produit des projets de réformes complets, concrets et applicables dans tous les domaines : santé, éducation, sécurité, administration publique, justice, lutte contre la corruption, institutions, sécurité sociale, etc. Tous ces projets n’attendent que d’être appliqués. J’aime tellement notre pays et notre nation que, lors de la période de transition qui s’est ouverte en 2008 en Guinée, parce que la transition n’allait pas dans le bon sens et parce qu’il me semblait inadmissible de louper une nouvelle occasion de remettre le pays sur le bon chemin, j’ai effectué 208 km de marche pénible, j’ai consenti à ce jour 35 rudes journées de jeûne, et j’ai récolté à ce jour 1480 signataires pour la pétition pour une Nouvelle République. J’ai consenti ce sacrifice personnel pour envoyer un message clair à la nation et réclamer au nom de la LDRG une Nouvelle République moderne, juste, équitable et sans abus de pouvoir en Guinée. Que ce message soi entendu ou pas, qu’il soi compris ou pas, la LDRG continu encore à agir pour changer le cours de l’histoire en Guinée. Aujourd’hui notre Mouvement est représenté sur toute l’étendue du territoire nationale. Je crois en la diversité de nos cultures et de nos traditions. Mais je crois surtout en l’unité de notre nation. Voilà pourquoi, mes chers compatriotes, comme le disait ci-bien le Mahatma Gandhi : « s’il y a des causes pour lesquelles je suis prêts à sacrifier ma vie, il n’y a aucune cause pour laquelle je suis prêts à tuer ». Le projet de ma vie c’est l’amour d’autrui, c’est l’amour de notre nation. Jusqu’à mon dernier souffle, j’irai chercher la partie saine en chacun de mes compatriotes. Aucune haine et aucune répression ne me fera dévier de cette mission.
Guinéennes et guinéens,
Si nous y sommes contraint, alors nous n’aurons pas le choix. Mais aujourd’hui, au moment où je m’adresse à vous, heureusement que nous avons encore le choix. Voilà pourquoi, parce que vous savez et vous avez la preuve que je vous aime et que j’aime profondément notre nation, je vous prie de ne pas accepter l’abîme : Rejetons l’abîme! Rejetons l’abîme! Il faut être conscient que notre nation vient de très loin. Nous avons pris des choix historiques que seuls de grandes nations peuvent assumer. Voilà 60 années que nous assumons nos choix historiques. Entre-temps, il y a eu trop d’injustices et de discrimination. La vie est devenue extrêmement rude et la misère gronde dans tous les foyers. Les populations ne savent plus où donner de la tête. En ces moments de grande détresse, les bas instincts du peuple sont facilement manipulables. N’importe quel marchand d’illusions est capable de créer des troubles et diviser les populations selon leur appartenance ethnique pour accéder au pouvoir. Le miracle est même de se rendre compte que nous connaissons encore aujourd’hui une paix relative en Guinée. C’est cette paix relative que nous sommes appelé à transformer en une bénédiction nationale. Ce n’est pas le moment de baisser les bras : « notre projet d’une nation unie, solidaire et prospère est possible parce que la solution existe ». La solution existe, mais il faut commencer par reconnaître que la Vérité n’est dans aucun camp politique aujourd’hui en Guinée :
- D’une part, nous avons un régime à la dérive qui a échoué dans tous les domaines. C’est un régime qui appelle désormais sa propre population à la violence car il se nourrit de la division, de l’ethnocentrisme et de la violence.
- D’autre part, nous avons une opposition politique qui marche aveuglement vers le pouvoir. Une opposition qui refuse l’autocritique et qui refuse d’assumer sa propre part de responsabilité dans la situation pré-apocalyptique qui prévaut aujourd’hui en Guinée.
Pourtant, depuis la période de transition en 2008, je n’ai jamais cessé de le répéter. Voilà plus de 10 années que je le répète. Aujourd’hui encore je me fais l’obligation de vous répéter la seule Vérité qui vaille pour notre pays : « dans ce contexte institutionnel et politique qui nous été imposé par décret durant la période de transition, toute élection ne fera qu’augmenter les tensions politiques et diviser notre nation. Ce fut le cas depuis les premières élections présidentielles de 2010. Et les élections locales de février 2018 sont même entrain de faire glisser notre nation vers l’abîme. Et ça sera ainsi tant et aussi longtemps que nous resterons dans le même contexte institutionnel et politique ».
J’ai déjà eu à l’expliquer à plusieurs reprises, mais je me fais encore le devoir de le réexpliquer : « la constitution dictée et décrétée contre le peuple au cours de la transition donne tous les pouvoirs à une seule personne, le Président de la République. De plus, l’État est encore fortement centralisé en Guinée. Dans ce contexte, quiconque accède au pouvoir, aura tous les pouvoirs. Et quiconque n’y accède pas, n’est absolument rien et n’aura absolument rien. Non seulement il n’existe aucun véritable contre-pouvoir institutionnel, mais de plus, il n’y a aucun partage de pouvoir entre gouvernement central et gouvernements locaux; de même, il n’y aucun partage de pouvoir entre parti au pouvoir et partis d’opposition. En rajoutant à cela la dimension ethnique qui teinte les partis politiques en Guinée, si vous organisez des élections dans ce contexte, vous comprenez donc facilement pourquoi certains acteurs sont prêts à frauder et massacrer pour se maintenir au pouvoir; alors que d’autres acteurs sont prêts à marcher sur des cadavres pour arriver au pouvoir ». Voilà la Vérité que les différents camps politiques refusent d’entendre en Guinée parce que tout simplement, quelques soient leur rivalité, ces deux camps politiques ont en commun la farouche volonté de garder le système tel qu’il est afin que quiconque parmi eux accède au pouvoir, qu’il puisse continuer à abuser de nos richesses tout en opprimant impunément le peuple. Voilà la Vérité!
Guinéennes et guinéens,
La solution existe. Mais elle passe d’abord par la reconnaissance de cette Vérité. Quiconque reconnait cette vérité sait qu’il est primordiale, avant les prochaines élections, de doter notre pays d’une Nouvelle République moderne, juste, équitable et sans abus de pouvoir. Cela est absolument nécessaire pour garantir aux uns et aux autres qu’ils ne seront plus jamais exclus du processus de décision et de gestion politique car quiconque gagnera les prochaines élections, n’aura pas tout gagné; et quiconque perdra, n’aura pas tout perdu. Cela est nécessaire pour ramener la confiance entre les différents acteurs et la sérénité envers le process électoral de notre pays. Cela est nécessaire afin de créer de véritables contre-pouvoirs qui favoriseront un règlement institutionnel des crises politiques en lieu et place des marches politiques qui se terminent toujours par des morts et des accords politiques farfelus. Cela est enfin nécessaire pour ramener la stabilité politique indispensable pour amorcer un quelconque développement socioéconomique censé bénéficier à la grande majorité de nos populations.
Mes très chers compatriotes,
La voie la plus appropriée pour doter notre pays d’une Nouvelle République moderne, juste, équitable et sans abus de pouvoir est la tenue, dans un bon état d’esprit, d’une Concertation nationale ouverte, inclusive et participative dans le but de rédiger une Constitution qui intègre les principes de décentralisation, de partage du pouvoir, et de contre-pouvoirs que j’ai énoncé précédemment. Les institutions issues de la Nouvelle Constitutions devront être meublées conformément à la feuille de route de la concertation nationale avant les prochaines élections. Voilà la solution et la voie qui mène à cette solution. Mais, naturellement, cette solution est loin de faire l’unanimité car, non seulement aucun camp ne veut admettre la Vérité, mais de plus, aucun des deux camps ne veut véritablement changer le système oppressif en place. L’un des camps ne veut modifier la constitution que pour se maintenir au pouvoir, alors que l’autre camp ne veut pas entendre parler d’une modification de la constitution. Pourtant, la solution est bien là quelque part : « il s’agit de prendre le temps de modifier suffisamment la constitution et de meubler les nouvelles institutions afin de briser le cycle politique infernale dans lequel nous sommes engouffrés depuis la transition de 2008 ». J’appelle donc les deux camps politiques en Guinée à calmer leurs ardeurs et leurs envies immédiats de pouvoir afin de permettre à la nation de mieux organiser son système institutionnel et de gouvernance. Mais, comme ça a toujours été le cas, il est évident que cet appel lancé aux acteurs politiques guinéens tombera à nouveau dans de sourdes oreilles. Voilà pourquoi nous ne devons pas attendre que cette solution fasse l’unanimité. Je suis quelqu’un qui croît fortement en la force de la volonté commune. Tout ce que nous avons donc à faire est, non seulement de rejeter l’abîme, mais surtout de continuer à mobiliser nos compatriotes, au-delà des partis et des ethnies, en faveur de cette Nouvelle République moderne, juste, équitable et sans abus de pouvoir. Nous représentons aujourd’hui la partie saine de cette nation : assumons nos responsabilités!
Je vous remercie de votre aimable attention.
Mamadou Oury Diallo
Président de la LDRG