
Ceux qui ne veulent pas d'une révision de la Constitution en Guinée ont un argument qu'ils brandissent à tout bout de champs. Cet argument mérite d'être démonté pièce-par-pièce afin que la tromperie cesse. Cet argument, le voici: "la constitution est bien, ce sont ceux qui sont au pouvoir aujourd'hui qui ne respectent pas les lois".
1-Premièrement, cet argument sous-entend que lorsque le pouvoir va changer de main, comme par miracle, subitement les lois seront respectées en Guinée. Je crois que même les militants les plus aveugles savent que ceci est faux!
2-Deuxièmement, cet argument encourage les populations à ne pas s'impliquer dans le processus démocratique; car il prédispose les populations à attendre un leader beau, gentille, sage, vertueux, qui n'abusera jamais de son pouvoir, qui ne violera jamais les lois, et qui n'appliquera jamais les lois en sa faveur. Là aussi, je crois que même les nouveaux nés ne croient plus à ce genre de légendes surtout que la majorité des leaders politiques en Guinée ont participé impunément aux pillages des ressources du pays. Ils ont tous les mains sales.
Finalement, j'aimerai que tous les citoyens guinéens, ceux qui militent dans un parti politique comme ceux qui ne militent pas dans un parti politique, j'aimerai que vous compreniez quelque chose de fondamental: tant et aussi longtemps que vous attendrez un leader politique gentille qui vous promets qu'il ne violera pas la loi et qu'il n'abusera pas de son pouvoir, vous serez désagréablement surpris et la Guinée n'avancera jamais. Si un acteur politique vous dit qu'il ne violera pas la loi, qu'il n'abusera pas de son pouvoir, et qu'il n'y aura plus de corruption quand il sera président, alors pourquoi ce même acteur politique ne voudrait-il pas réviser la constitution pour introduire une réelle indépendance de la justice, introduire un organe anti-corruption réellement indépendant, introduire une réelle indépendance de notre Banque centrale, introduire une obligation de reddition de comptes pour lui et ses ministres, etc. Pourquoi refusent-ils cela?
Lorsque l'on construit des institutions, on les construit non seulement en tenant compte de nos réalités locales, mais aussi et surtout, on ne les construit pas pour des leaders beaux, sages et gentilles. Ces leaders n'existent que dans la légende. Lorsque l'on construit des institutions, on les construit pour contraindre quiconque arrive au pouvoir à ne pas abuser de son pouvoir et à gouverner dans l'intérêt de la nation. Il n'est pas demandé à un leader, une fois au pouvoir, d'être gentille. Un leader, une fois au pouvoir, n'a qu'une seule vocation: réaliser ses promesses électorales et gouverner selon la loi. Si il commence à s'écarter de la loi, des institutions fortes et indépendantes doivent être là pour le contraindre à la bonne gouvernance et le ramener dans ses strictes prérogatives.
Avec la constitution qui a été rédigé à huis-clos et décrété contre la nation en mai 2010, ces institutions fortes et indépendantes qui doivent contraindre les politiciens à la bonne gouvernance et qui doivent les ramener à l'ordre n'existent pas. D’où la nécessité d'une révision constitutionnelle ouverte, participative et sanctionnée par un Référendum afin d'introduire ces garde-fous indispensables pour faire avancer notre pays.
MAMADOU OURY DIALLO
PRÉSIDENT DE LA LDRG