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Guinéennes et guinéens,
Mes très chers compatriotes,
Tout d’abord, suite aux récents troubles qui ont eu lieu en Guinée, je tiens à adresser ici mes condoléances les plus attristés aux familles des innocentes victimes. En chacune de ces victimes, je vois mes propres enfants. La douleur ne me quitte plus. Il est extrêmement douloureux de perdre ainsi ses enfants. Rien ne justifie une telle folie de pouvoir et du pouvoir. Je prie Dieu le Tout Miséricordieux de pardonner et d’accueillir ces innocentes âmes dans ses jardins du paradis. Je joins aussi ma voix à celle de l’imam de la grande mosquée Fayçal de Conakry et à celle de l’archevêque de Conakry pour exhorter les uns et les autres au respect scrupuleux de la vie humaine qui est la création la plus sacrée que Dieu.

Mes très chers compatriotes,
Nous sommes tous au regret de constater que la tragédie qui est en train de se dérouler sous nos yeux est devenue trop récurrente dans notre pays depuis la période de transition de 2008. À l’approche de chaque élection, ce sont des marches politiques incessantes qui se terminent le plus souvent par la violence, la désolation et le deuil. Aujourd’hui, nous sommes arrivé à la limite du basculement vers des lendemains très sombres dans notre pays, car désormais même les dépouilles et le deuil des pauvres familles sont sujets à la manipulation politicienne des uns et à la répression armée des autres. Aucune volonté d’accéder au pouvoir et aucune volonté de se maintenir au pouvoir ne peuvent justifier de telles atrocités sur nos terres de Guinée. Je demande donc aux uns et aux autres de mettre immédiatement fin à cette surenchère politicienne totalement sordide et satanique sur nos terres de Guinée.

Guinéennes et guinéens,
Mes très chers compatriotes,
Après 14 années d’un exil-voulu jalonné d’épreuves, de réflexions, de méditations, de sacrifices personnels et de solitude, je suis récemment rentré en Guinée pour un court séjour. J’ai choisi d’y retourner seulement maintenant parce que ces 14 dernières années ma parole et mes idées n’avaient pas leur place en Guinée. Je suis donc rentré en Guinée en ce moment précis parce que le débat et la contradiction sur le sujet le plus important pour l’avenir de notre nation a enfin commencé et a pris corps au sein de notre nation. Durant ce court séjour, je suis allé dans le pays profond et je suis revenu à la côte atlantique. Je me suis donc confronté aux réalités sociales et économiques de notre nation. J’ai également eu l’occasion de rencontrer toutes sortes de compatriotes à toutes les échelles de notre société. J’ai serré des mains de personnes âgées et des mains de jeunes. J’ai parlé et j’ai eu des accolades franches et fraternelles avec des frères et sœurs forestiers, soussous, malinkés et peuls. J’ai parlé à la Guinée qui décroche, celle qui s’accroche et celle qui bouge. 

De ce court séjour, je reviens avec la conviction inébranlable que la Guinée est une FAMILLE. Je le sais, dire cela dans le contexte actuel n’est pas populaire, mais je vous le dit les yeux dans les yeux : la Guinée est une famille. Nous sommes une famille. J’ai ressenti le même amour fraternel venant de mes compatriotes forestiers, soussous, malinkés et peuls. Le même amour fraternel. Voilà pourquoi nous devons totalement rejeter les discours et les rhétoriques politiciennes de haine. Et cette responsabilité revient d’abord aux acteurs politiques de notre pays. Autant il n’est pas vrai que Cellou Dalein Diallo est un cannibale; autant c’est totalement faux, Alpha Condé n’est pas un monstre. Ce n’est pas un monstre, c’est même un fils digne de notre nation. Ce sont les discours et les rhétoriques politiciennes de haine qui créent des stéréotypes et endoctrinent les masses populaires, amenant ainsi des compatriotes à se liguer les uns contre les autres, comme une famille de fous où les aînés entraînent les plus jeunes à s’entretuer.

Mes très chers compatriotes,
De par notre histoire, de par le sang qui nous lie, et de par notre volonté commune de vivre ensemble, nous sommes inconstablement une famille. Cela dit, cependant, il serait totalement hypocrite et lâche de nier qu’il y a un sérieux problème au sein de notre nation, au sein de notre famille. Mais comme je viens de le dire, le problème que nous avons au sein de notre nation n’a rien à avoir avec Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo. C’est totalement faux! Ce n’est ni Alpha Condé ni Cellou Dalein Diallo le problème. Le véritable problème que nous avons au sein de notre nation depuis ces 60 dernières années est un problème de PARTAGE DE POUVOIR. Je le répète encore une fois : « le véritable problème que nous avons au sein de notre famille, est un problème de partage de pouvoir ». Très concrètement, il y a une catégorie de notre famille qui a fini par croire que les autres membres de la famille refusent coûte que coûte qu’elle accède au pouvoir. Voilà tout le problème et, au regard des centaines de morts qui s’accumulent année après année dans les luttes de pouvoir, il serait à la fois hypocrite, lâche et totalement irresponsable de nier aujourd’hui ce problème que nous avons au sein de notre nation. C’est un problème qui a perduré pour devenir une crise. Cette crise a perduré et est en train de devenir un conflit. Le conflit arrive petit à petit, et ça serait être aveugle de ne pas le voire arriver. La meilleure manière de laisser ce conflit s’installer durablement au sein de notre famille est de continuer à nier l’existence du problème et à faire comme si de rien n’était. En ce moment, il s’installera alors définitivement. Que Dieu le Tout Puissant nous en garde, car rien de pire que la guerre civile. Il faut peut-être demander à nos voisins du Libéria, de la Sierra Leone, et de la Côte d’Ivoire. Il faut demander à nos frères et sœurs du Rwanda et de Centrafrique. Que Dieu nous en garde! Mais le choix appartient en réalité à chaque membre de notre famille. Voulons-nous vraiment la guerre civile? Si nous ne voulons pas la guerre civile au sein de notre nation, la première des choses à faire pour chaque membre de notre famille est, non seulement de reconnaître ouvertement le problème de PARTAGE DE POUVOIR que nous avons au sein de notre nation, mais aussi, d’amener ce problème sous l’arbre à palabre afin qu’on puisse trouver ensemble une solution comprise et acceptée par tous. Voilà le début de la solution.

Mes très chers compatriotes,
Autant il est important d’insister sur le fait que le seul problème que nous avons au sein de notre nation est un problème de partage de pouvoir, autant il est extrêmement important de rappeler ici que celles et ceux au sein de notre nation qui continuent à croire que ce sont les élections présidentielles ou les coups d’État militaires qui vont un jour résoudre ce problème ont totalement tors. Ça n’arrivera jamais ainsi! Combien d’élections avons-nous connu en Guinée? Et combien de Coups d’État avons-nous connus? Est-ce que cela à permis de résoudre le problème que nous avons au sein de notre nation depuis 60 ans?

Les problèmes de partage de pouvoir se résolvent d’abord par une entente sociale, un pacte social, un nouveau système consensuel de partage de pouvoir avec lequel tous les membres de la famille sont certains et convaincus que s’ils cèdent le pouvoir aujourd’hui, ils l’occuperont à nouveau lorsque leur tour arrivera. Dans le cas de pays comme la Guinée connaissant une diversité et une polarisation ethnique, ce ne sont jamais les élections présidentielles qui permettent d’avoir ce genre pacte social. Tout au contraire, c’est à l’occasion de Consultations nationales entre guinéennes et guinéens, membre d’une même famille, que ce nouveau Pacte se forge. Voilà pourquoi, du haut de mes modestes 35 jours de jeûne et 208 km de marche, autant j’exhorte l’ensemble des acteurs politiques de la Mouvance présidentielle à reconnaître ouvertement le problème de Partage de pouvoir que nous avons au sein de notre nation, autant j’exhorte les acteurs politiques de l’opposition ayant boycotté les Consultations nationales à reconsidérer leur position afin de venir autour de la table du dialogue dans l’unique et seule dessein de négocier un véritable partage de pouvoir entre compatriotes d’une même famille. 

En matière de Partage de Pouvoir, il y a deux principales idées à considérer :

•    D’abord, il y a l’idée d’une présidence tournante, chaque 5 années, entre les 4 régions naturelles de la Guinée : il s’agit de faire de la fonction de Président de la République une fonction hautement symbolique et protocolaire qui incarne l’unité de la nation. Par contre, la gouvernance du pays reviendra au parti politique qui obtiendra la majorité des sièges au Parlement suite aux élections législatives. En quelque sorte, nous basculons vers un régime parlementaire. L’avantage de ce système est que, non seulement tous les membres de la famille occuperont de manière certaine la Présidence de la République à leur tour, mais de plus, nous sortons du culte de la personnalité pour revenir à la politique de proximité avec les populations. L’élection du député deviendra alors une élection déterminante. Et comme il n’y a pas qu’un seul député par parti, cela réduit donc le culte de la personnalité et l’ethnocentrisme aveugle. Le chef du parti ayant obtenu la majorité au Parlement devient alors le Premier ministre Chef du Gouvernement avec des pouvoirs étendus pour mettre en œuvre les politiques publiques. En matière de politique publique, les pouvoirs du Président de la République se limiteront aux questions de Défense nationale et de politique étrangère. En Afrique, un pays comme l’Éthiopie à presque le même système politique.

•    Puis, il y a aussi le Consociasonnalisme qui est un système de partage de pouvoir qui favorise la formation d’un gouvernement de grande coalition : C’est-à-dire que nous restons dans le régime présidentiel avec un Président de la République qui est élu suite à des élections régulières. Cependant, non seulement le premier ministre est issu du parti majoritaire au parlement suite aux élections législatives, mais de plus, le gouvernement devra refléter la composition du Parlement. Donc la majorité des sièges au gouvernement revient au parti majoritaire au Parlement, cependant les partis minoritaires sont obligatoirement et proportionnellement représentés au sein du gouvernement. De même, il y aura une seconde Chambre au sein de l’Assemblée nationale dont les membres sont élus par les conseils communaux de manière à représenter équitablement les 8 régions administratives du pays afin d’équilibrer les pouvoirs du Président de la République et du Gouvernement.

Guinéennes et guinéens,
Mes très chers compatriotes,
La Guinée est une famille. Nous sommes une famille. Notre famille connaît un sérieux problème. Ce problème, je l’ai dit, ce n’est ni Alpha Condé ni Cellou Dalein Diallo. Ce problème est un problème de PARTAGE DE POUVOIR. Les solutions à ce problème existent et je viens de présenter sommairement à quoi ressemble ces solutions. À présent, la balle est dans le camps des acteurs politiques guinéens : non seulement ils doivent tous reconnaître enfin ouvertement le problème de partage de pouvoir qui traverse notre nation, mais de plus, ils doivent tous ce faire violence pour accepter un dialogue inconditionnel. Ce dialogue inconditionnel est nécessaire pour :

1.    s’entendre sur l’une des solutions de partage de pouvoir que j’ai présenté; 
2.    associer le peuple à la formalisation de ce nouveau Pacte social au sein d’une Nouvelle Constitution; et
3.    soumettre cette Nouvelle Constitution au Référendum avant d’aller à une quelconque élection dans le pays. 

Toute élection organisée dans les conditions actuelles ne fera que nous rapprocher du conflit. Nous invitons donc les différents camps politiques en Guinée à la PAIX DES BRAVES! Nous devons absolument y arriver afin de tourner définitivement cette page d’instabilité politique et rassembler tous les efforts de notre famille pour le redressement et le développement de notre maison commune, la Guinée. Le monde autour de nous ne nous attend pas. Il est temps pour notre nation de nous pardonner, de nous réconcilier et de nous entendre afin de pouvoir aller de l’avant.

Qui Dieu protège notre pays et notre nation! Je vous remercie!

Mamadou Oury Diallo 

Tag(s) : #Politique-Guinée, #Guinée