Entre 80 000 et
120 000 manifestants ont pris part, samedi 30 juillet, à la contestation contre la cherté de la vie et pour la "justice sociale", dans dix villes israéliennes, selon les estimations de la police
ou celles des médias. En majorité des jeunes laïcs, les manifestants ont pour principal slogan "le peuple veut la justice sociale pas la charité". Ils réclament un retour à un "Etat providence"
tel qu'il avait été mis en place par la gauche sioniste dans les premières années de l'Etat.
A Tel-Aviv, principal foyer de la contestation, plus de 50 000 manifestants ont marché dans le centre-ville, selon la police. Les manifestants ont arboré dans une ambiance de kermesse des drapeaux israéliens ainsi que quelques drapeaux rouges. "Je suis venue parce que je n'arrive plus à boucler les fins de mois et que l'argent des impôts va dans les poches des magnats", confiait une manifestante, qui dirige un jardin d'enfants.
DÉMISSION AU MINISTÈRE DES FINANCES
A Jérusalem, 15 000 manifestants se sont rassemblés devant la résidence du premier ministre, Benjamin Nétanyahou, arborant des banderoles avec l'inscription "Toute une génération veut un avenir". A Haïfa, dans le nord d'Israël, plus de 10 000 manifestants sont descendus dans la rue, selon la police.
Première conséquence de cette révolte : le directeur général du ministère des finances, Haim Shani, a démissionné dimanche, "en raison de désaccords de longue date sur des questions essentielles", explique Shani dans un communiqué. "Les évènements de ces derniers jours ont amplifié les problèmes que j'ai pu décrire et me confortent dans l'idée que je ne suis pas en mesure de remplir ma mission dans les circonstances actuelles."
La protestation, qui visait au départ la flambée des prix des logements, porte plus généralement sur l'aggravation des inégalités sociales et la dégradation des services publics, notamment dans le domaine médical et de l'éducation. Avançant toute une gamme de revendications, les manifestants ont fustigé le premier ministre, accusant le pouvoir d'être au service de magnats de la finance, s'insurgeant contre la force des monopoles et des cartels en Israël, et réclamant la baisse des impôts indirects. Pour la première fois depuis que le mouvement a été lancé il y a un mois, la minorité arabe, qui souffre de discriminations particulières, s'y est associée.
À L'ORIGINE : LE COÛT DU FROMAGE BLANC
La contestation provient en premier lieu de classes moyennes écrasées par l'augmentation constante du coût de la vie, résultant d'une économie de marché contrôlée par quelques familles.
Lancée en juin via Facebook par le boycottage du fromage blanc, un aliment de base dont le prix avait flambé, la fronde a été ravivée par une étudiante qui a planté sa tente au centre de Tel-Aviv
pour clamer sa détresse face aux loyers chers.
Soutenue par l'Association israélienne des étudiants, par les partis de l'opposition, par des artistes qui ont chanté lors des rassemblements et, plus récemment, par la centrale syndicale Histadrout, cette initiative s'est répandue comme une traînée de poudre. Il y a aujourd'hui des camps de toile dans la plupart des villes du pays, et la protestation s'amplifie malgré les promesses lancées dans l'urgence par le premier ministre de réformer le marché de l'immobilier.
Il s'agit du plus important mouvement social en Israël en quatre décennies. Selon un sondage publié mardi par le journal Haaretz, 87 % des Israéliens le soutiennent et 54 % se disent "mécontents" de la gestion de cette crise par M. Nétanyahou.
Source: http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2011/07/31/la-contestation-sociale-s-etend-en-israel-et-fragilise-netanyahou_1554620_3218.html