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La société guinéenne a déjà des références sociologiques récentes quant à sa capacité à se rassembler pour réfléchir et faire face à son futur immédiat. Il s’agit des Concertations nationales de mars 2006 en Guinée[1]. En effet, en mars 2006, alors que le Général Lansana Conté, Président de la République à l’époque, était consumé par la maladie et absent du pays pour des traitements; confronté à une situation de vacance imminente de pouvoir, la société civile guinéenne a eu la maturité de convier les Concertations nationales de mars 2006 afin d’accoucher d’une Feuille de route qui servirait de guide dans l’éventualité d’une vacance de pouvoir. Quinze années plus tard, la Guinée se retrouve confronté à la même situation. C’est donc le moment du rassemblement de toutes les forces progressistes afin de définir une Feuille de route consensuelle qui servirait de cadre d’intervention dans l’éventualité d’une vacance de pouvoir en Guinée. Il y a déjà des forces qui œuvrent pour l’avènement d’une transition en Guinée, il s’agit notamment de la Ligue des Démocrates Réformistes de Guinée (depuis plusieurs années avec des contributions pertinentes[2] et une Pétition[3]). De toutes évidences, l’éventuelle transition en Guinée doit non seulement se caractériser par son pragmatisme, mais de plus, elle doit intégrer les leçons des déboires de la transition de 2008. De ce fait, elle doit avoir des organes de gestion biens identifiés, un mandat clair quant à la migration vers une démocratie apaisée de Partage du pouvoir, et une durée tout juste suffisante pour la réalisation de ce mandat.

A) Les organes de gestion de la transition : tel que le conçoit le Ligue des Démocrates Réformistes de Guinée (LDRG), il doit y avoir trois principaux organes de gestion de l’éventuelle transition en Guinée :

  1. Un Gouvernement d’Union Nationale : qui sera composé d’acteurs issus de toutes les forces vives de la nation (partis politiques, société Civile et forces armées) qui n’ont jamais été impliqué dans des affaires controversées ou de corruption. Ce Gouvernement d’Union Nationale sera présidé par une personnalité consensuelle ;
  2. Un Conseil National de la République : faisant fonction de Parlement et composé de représentants des partis politiques, de la société civile et des forces armées dont la moralité ne souffre d’aucune entorse et qui n’ont jamais été impliqué dans des affaires de corruption; et
  3. Une nouvelle Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) : composée de techniciens professionnels non-politiques et chargés d’organiser et gérer l’ensemble du processus électoral (en amont et en aval jusqu’à la proclamation des résultats provisoires).

Les membres du Gouvernement d’Union National et des organes de la transition ne pourront en aucun cas être candidats aux prochaines élections législative et présidentielle.

B) Le mandat du gouvernement d’Union nationale : tel que le conçoit la Ligue des Démocrates Réformistes de Guinée (LDRG), l’éventuel gouvernement d’Union nationale aura cinq (5) principales missions :

  1. La restructuration de l’Administration publique de manière à dépolitiser la fonction publique, y compris les forces armées, la police et la gendarmerie nationale ;
  2. L’adoption d’un Projet de Loi Anti-corruption et l’implantation de mécanismes systémiques de lutte contre la corruption à toutes les échelles de la vie publique et économique ;
  3. L'ouverture d’enquêtes pour les principaux crimes économiques et humains du régime actuel et la traduction des responsables de ces crimes devant la justice avant la fin de la transition;
  4. L’organisation dans la transparence la plus totale, avec l’aide d’experts internationaux et locaux, d’un recensement général et exhaustif de la population guinéenne à l’issue duquel la nouvelle Commission Électorale élaborera un nouveau fichier électoral ; et
  5. La révision de la Constitution à faire adopter par Référendum.

C) Le processus de révision constitutionnelle : ce processus doit non seulement impliquer le Conseil National de la République faisant office de Parlement transitoire, mais surtout, afin d’éviter de reproduire les mêmes erreurs que celles de la transition de 2008, il doit être participatif pour recueillir les avis de toutes les composantes de la nation sur les six principaux facteurs cités ci-bas. Ce processus de révision constitutionnelle doit faire migrer la Guinée vers une démocratie apaisée de Partage du pouvoir en :

  1. Consacrant l’indépendance organisationnelle et fonctionnelle de la Banque centrale afin, non seulement de mettre autant que possible l’économie et le pouvoir d’achat des populations à l’abri de la mauvaise gouvernance, mais aussi et surtout, de commencer véritablement à préparer l’économie guinéenne à l’adhésion aux marchés uniques régional et continental;
  2. Consacrant les pouvoirs constitutionnels de l’Organe Anti-corruption indépendant pour en faire une institution constitutionnelle centrale dans le fonctionnement des pouvoirs publics;
  3. Consacrant un mode de désignation électif des Gouverneurs des huit régions administratives de la Guinée, tout en définissant les pouvoirs et les ressources additionnelles à transférer aux régions. Avec ce schéma, les populations locales auront une première garantie que ce sont elles qui décident des politiques qui impactent directement leur quotidien quel que soit celle/celui qui sera au « Palais Sékoutoureya ». De même, un Président de la République sera constitutionnellement contraint de tenir compte de cette réalité régionale pour diriger le pays;
  4. Consacrant un nouveau mode de scrutin qui introduit la nécessité pour les candidats aux élections présidentielles de recueillir un quota minimum de 10% des voix dans chaque région administrative pour être élu Président de la République en Guinée. Avec ce schéma, non seulement les partis politiques d’envergure nationale seront dans l’obligation d’avoir des représentants dans toutes les régions, mais de plus, il y aura peu de chance que des candidats qui prônent la division ethnique puissent accéder à la Magistrature Suprême;
  5. Consacrant une seconde Chambre au sein de l’Assemblée nationale. Les membres qui siégeront au sein de cette seconde Chambre devront être élus par les Conseils des collectivités locales. Toutes les huit régions administratives y pourvoiront le même nombre de membres. Elle sera une Chambre à composition équitable. Le rôle de cette seconde Chambre de l’Assemblée nationale sera de valider les nominations : des Juges de la Cour Constitutionnelle, du Chef d’État-major général des armées, du Gouverneur de la Banque centrale, du Président de la Commission électorale nationale indépendante (tous ces hauts magistrats et ces hauts cadres devront être nommé avant la fin de la transition selon les nouvelles règles établies). De même, cette seconde Chambre de l’Assemblée nationale sera consultée en seconde lecture de tous les projets de lois référendaire, de découpage des circonscriptions électorales, du code électoral, et des traités internationaux. Cette seconde Chambre à composition équitable sera donc une garantie additionnelle pour toutes les composantes de la nation quant à leur participation aux processus d’élaboration des lois et de nomination des plus hauts fonctionnaires de l’État;
  6. Consacrant un véritable bicéphalisme au niveau du pouvoir exécutif qui se caractérise par le fait que le Premier Ministre et 60% des membres du Gouvernement proviennent du parti politique majoritaire au Parlement. Les 40% restant des membres du Gouvernement devront obligatoirement et constitutionnellement provenir par ordre de représentativité des partis politiques de l’opposition représentés au Parlement. Des clauses de stabilité devront être introduites afin d’éviter la paralysie du Gouvernement et des crises intempestives de l’Exécutif. Avec ce schéma, non seulement toutes les composantes de la nation seront représentées au sein du Gouvernement, mais de plus, une fois les élections terminées, les partis politiques seront contraints de travailler ensemble sur les projets qui les rassembles.

Introduire et donner vie à ces six (6) principes d’une démocratie apaisée de Partage du pouvoir sera la mission la plus importante de l’éventuelle transition et du gouvernement d’Union nationale qui aura la charge de conduire cette éventuelle transition.

D) La durée de la Transition : Il est important de fixer un délai connu d’avance dès l’ouverture de la transition afin de faire converger tous les efforts vers l’accomplissement des objectifs définis dans les délais impartis. Les cinq (5) missions assignés plus haut au gouvernement d’Union nationale doivent tous être accomplis au bout de 36 mois. De ce fait, la durée de la transition ne doit pas dépasser 36 mois quel que soit le scénario. L’éventuelle transition devra prendre fin suite à un double scrutin (élections législatives et Référendum sur la nouvelle Constitution) organisé par la nouvelle Commission Électorale Indépendante. Les conséquences de ce double scrutin seront immédiats quant à la formation du futur Gouvernement dont la structure et la composition devront répondre aux nouvelles règles établies par la nouvelle Constitution. Le Président de la transition devra rester en fonction jusqu’aux prochaines élections présidentielles. Entretemps, le pouvoir exécutif (Gouvernement et Président de la République) fonctionnera selon les règles de bicéphalisme établies par la nouvelle Constitution.

La Feuille de route définie ci-haut est le chemin qui permettra à la Guinée de tourner enfin la page d’un passé de violence et de haine ethnique pour ouvrir une nouvelle page faite de promesses d’un avenir radieux à construire dans le Travail, la Justice et la Solidarité. Cette feuille de route proposée par la LDRG est accompagnée de 41 jours de jeûne initié depuis la transition de 2008, de 215 km de marche initié depuis la transition de 2008, et de 1624 signataires de la pétition pour une Nouvelle République moderne, juste, équitable et sans abus de pouvoir.

E) Les Recommandations aux différents acteurs en Guinée : La Ligue des Démocrates Réformistes de Guinée (LDRG) propose une série de recommandations à chaque catégorie d’acteurs :

1) Aux acteurs sociopolitiques en Guinée : aux acteurs sociopolitiques qui mènent la résistance pacifique sur le terrain face au régime ethnocentrique voyou du Président Alpha Condé, nous recommandons de :

  1. Renforcer leur unité d’action;
  2. Prôner l’amour du prochain envers toutes les composantes de la nation et de ne jamais verser dans la rhétorique ethnocentrique; et
  3. Soutenir cette Feuille de route pour une Transition salutaire en Guinée.

2) Aux forces armées guinéennes : aux forces armées guinéennes dans leur intégralité :

  1. Éviter toute effusion de sang sur l’ensemble du territoire national;
  2. Respecter scrupuleusement la chaîne de commandement militaire pour éviter des conflits entre différentes factions militaires;
  3. Garantir l’intégrité physique des anciens dignitaires, notamment la Présidence, le Gouvernement et le Parlement. De même que celle des personnalités politiques exposées à de forts risques de représailles politiciennes; et
  4. Soutenir cette Feuille de route pour une Transition salutaire en Guinée.

F) À la CEDEAO, l’Union Africaine et l’Organisation Internationale de la Francophonie : à ces trois organisations traditionnellement impliquées dans la résolution des crises et le processus électoral en Guinée, nous recommandons de :

  1. Soutenir et accompagner les acteurs progressistes pour la migration vers une République inclusive de partage de pouvoir en Guinée; et
  2. Accompagner l’éventuelle Gouvernement d’Union nationale pour la réussite de ses cinq principales missions énoncées dans cette feuille de route.

G) À l’Organisation des Nations Unies, l’Union Européenne, la France, le Canada, les États-Unis d’Amérique, la Chine, la Russie, et les pays du Golf :

  1. Dépêcher sans délai, dans le cadre d’une Résolution de l’ONU, un Groupe de Contact international pour soutenir et accompagner les acteurs progressistes en Guinée dans les efforts pour la migration vers une République inclusive de partage de pouvoir en Guinée; et
  2. Accompagner l’éventuelle Gouvernement d’Union nationale pour la réussite de ses cinq principales missions énoncées dans cette feuille de route.

Ces premières recommandations édictées aux différents acteurs et parties prenantes permettra, non seulement d’encadrer convenablement le processus de transition en Guinée, mais aussi, d’en sortir avec des gages de stabilité où aucune partie ne sera perdante et où, pour une première fois depuis plusieurs décennies, le peuple de Guinée aura enfin droit d’espérer à un meilleur avenir.

Mamadou Oury Diallo

Président de la LDRG

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