La médiation du président burkinabé
Blaise Compaoré a été payante. Au moins sur le papier. Un nouveau gouvernement ivoirien avec des membres de l'opposition doit être annoncé dans la journée (mardi). Elle n'a toutefois pas confirmé
sa participation à la nouvelle équipe. Les dirigeants du RHDP et du PIT se réunissent aujourd'hui pour en discuter. Une nouvelle Commission électorale indépendante (CEI) doit être formée "dans la
semaine".
Sursis ou rémission ? L’incertitude planant sur l’avenir politique de la Côte d’Ivoire semble avoir été levée, du moins pour les prochains jours. Arrivé en urgence ce lundi à Abidjan après avoir
reçu la veille une délégation de l’opposition ivoirienne à Ouagadougou, le président burkinabé Blaise Compaoré a dirigé une médiation qui a permis un déblocage de la situation, alors que deux
personnes sont encore mortes lundi à Daloa (Ouest) dans de nouveaux affrontements entre opposants et forces de l’ordre (lesquelles auraient tiré à balles réelles). Un drame qui s’ajoute à celui
de Gagnoa (Centre-Ouest), où cinq personnes étaient décédées vendredi dans des circonstances similaires. Ce qui avait conduit la France à appeler au « dialogue » et à la « responsabilité » des
dirigeants ivoiriens.
Parrain de l’accord d’hier, obtenu à l’arraché, le « facilitateur » Compaoré a indiqué que l'opposition avait finalement « accepté » de « s'engager dans la reconstruction du gouvernement » qui
doit être connu ce mardi 24 février.
Celle-ci n'a toutefois pas pas confirmé la nomination de ministres issus de ses rangs au sein du nouveau cabinet. Ce sujet était certainement au menu des discussions entre l'ancien président
Henri Konan Bédié et l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara à Abidjan ce matin. Les deux leaders du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) ont été rejoint au
domicile de Bédié par Francis Wodié, président du Parti ivoirien des Travailleurs (PIT).
L’opposition renoncerait donc à la condition qu’elle avait posée pour sa participation à l’exécutif, à savoir le « rétablissement » préalable de la Commission électorale indépendante (CEI) qui
avait été dissoute par le chef de l’Etat Laurent Gbagbo avec le gouvernement, le 12 février dernier. Celle-ci doit être annoncée « dans la semaine ».
Boîte de Pandore
Selon Guillaume Soro, Premier ministre reconduit et leader des Forces nouvelles (ex-rébellion), le premier conseil des ministres devrait se tenir dans la foulée de l’annonce du gouvernement par
Laurent Gbagbo. Cette avancée devrait « permettre de travailler très rapidement sur la qualité de la liste électorale » en vue de « fixer très rapidement une échéance pour l'élection
présidentielle cette année », a déclaré Compaoré hier soir, en compagnie de Gbagbo et Soro.
La CEI est chargée d'organiser un scrutin présidentiel sans cesse reporté depuis la fin du mandat de Laurent Gbagbo en décembre 2005. Les derniers événements l’ont encore renvoyé à une date
indéfinie. Le dernier président de la CEI Robert Mambé Beugré a été accusé par le camp présidentiel de « fraude » sur la liste électorale et de complicité avec l'opposition. Sa faute : avoir
tenté, selon l'enquête judiciaire ouverte par le ministère de l'Intérieur, d'introduire frauduleusement 429 030 noms sur la liste définitive. La dissolution de la CEI et celle du gouvernement, le
12 février, avait rouvert la boîte de Pandore.
Outre les sept morts de Gagnoa (ville natale de Laurent Gbagbo) et de Daloa, le CICR a fait état de nombreux blessés dans plusieurs endroits du pays. Comme à Abobo, quartier populaire du nord
d'Abidjan dirigé par le Rassemblement des républicains (RDR) de Alassane Ouattara, où les échauffourées auraient fait au moins "trois blessés". À Katiola (centre), le domicile du porte-parole du
chef de l'Etat, Gervais Coulibaly, avait été saccagé la semaine dernière. Dans ce climat tendu, la diffusion de la chaîne de télévision France 24 avait été « suspendue » lundi pour « traitement
non professionnel de l'information » sur « l'actualité politique » ivoirienne. Une décision que la direction de la chaîne française juge « injustifiée » et qu’elle a « regretté ».
Source: http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20100223095215/opposition-manifestation-laurent-gbagbo-guillaume-soroaccord-a-l-arrache-sous-l-egide-de-compaore.html